Le pétrole ou le gaz sale des ‘carrières’ comme on l’appel, en cours d’introduction par les américains sur le marché mondial n’est qu’un pavé jeté dans la marre, une diversion de la politique américaine pour déstructurer le marché mondial du GNL en plein évolution.
Le 16 avril 2010 à Oran, les ma-jors producteurs-exportateurs de GNL et les instances internationales de la protection de l’environnement s’allieront pour faire barrage à l’entrée des hydrocarbures sales dans le commerce international. En plus de la nocivité, la rentabilité économique de l’exploitation des hydrocarbures non-conventionnels (schistes bitumineux et autres) est hypothétique puisqu’elle nécessite d’une part un prix du baril de pétrole élevé, plutôt à 100 dollars, et d’autre part un prix du carbone plutôt bas de 50 dollars la tonne de CO2, et de surcroît que certains pays européens viennent de la supprimer carrément. Ces deux facteurs ont une probabilité limitée d’être réunis que d’ici dans deux ou trois décennies pour valider cette source d’énergie.
Les schistes, l’énergie la plus sale et la plus chère de la planète.
On estime aujourd’hui que la production de pétrole ou de gaz à partir de schistes bitumineux devient économiquement viables si le prix de baril se situe autour de 100 dollars c’est du moins qu’attendent les américains pour commercialiser à grande échelle leur ‘pétrole sale’ produit à partir des carrières de schistes bitumineux. Néanmoins, la maîtrise des impacts sur l’environnement et la réduction des coûts représentent des défis majeurs à relever et corrompre le monde vert pour accepter cette calamité écologique. L’industrie des schistes bitumineux est en train de se structurer en catimini entre les Etats fortement industrialisés en panne d’énergie.
On assiste aujourd’hui à l’émergence de nouveaux projets, notamment aux Etats-Unis, en Chine, en France, au Brésil, en Jordanie, au Maroc, avec des acteurs industriels qui cherchent activement des partenaires. Le nombre croissant d’acteurs se positionnant sur des projets d’exploitation laisse augurer un développement important des schistes bitumineux, source de pétrole de l’après-pétrole disent les un, permises d’un malheur écologique de notre planète disent les autres. L’affaire de manque d’énergie aux Etats-Unis a atteint son paroxysme, le pentagone planifie des actions militaires au Moyen-Orient pour assurer ses approvisionnements en énergie, des chiffres astronomiques sont bazardés par l’administration américaine pour l’information sur l’énergie (United States Energy Information Administration) qui estime les réserves mondiales de schiste bitumineux (énergie fossile non-conventionnelle) à 2800 à 3100 milliards de barils de pétrole (450 à 520×109 m3) potentiellement exploitables, dont 1000 à 1200 milliards de barils aux Etats-Unis , ces chiffres semblent exagérément gonflés, vraisemblablement de l’intox.
Cependant, il ne faudrait pas cacher que des tentatives pour exploiter ces réserves ont cours depuis plus d’un siècle, bien avant l’invasion pacifique de l’Arabie Saoudite et du Koweït par les américains, l’occupation militaire de l’Irak et la tentative d’occupation de l’Iran , ont pour l’instant connu des résultats limités (temporaires). Le kérogène présent dans les schistes bitumineux peut être converti en pétrole à travers le processus chimique de la pyrolyse, ce que faisait le führer Adolphe Hitler, pendant la deuxième guerre mondiale pour palier au blocus des approvisionnements en carburant, que lui imposaient les américains et leurs alliés.
Les schistes bitumineux peuvent aussi être brûlés directement comme un combustible de basse qualité pour la création d’énergie et le chauffage, et peuvent être utilisés comme matériau de base dans les industries chimiques et des matériaux de construction, c’est exactement comme cette bouse de vache que nos grandes mères utilisaient pour chauffer leur four traditionnel, et nos ancêtres l’utilisèrent comme mortier de construction, il y’a de ça deux siècles. Le gaz et le pétrole non-conventionnels sont des hydrocarbures sales et polluants, leur rendement est mauvais : cinq fois plus chers que le pétrole traditionnel avec bilan énergétique est très faible, voire négatif, dans le sens où l’énergie utilisée pour obtenir le pétrole est souvent supérieure à celle obtenue en brûlant le combustible.
De plus, d’énormes quantités de vapeur d’eau sont consommées : il faut un à quatre barils d’eau chaude pour un baril de pétrole. Les schistes peuvent être comparés à une mauvaise houille, plus mauvaise que celle qu’utilisent les chinois pour produire leur énergie et polluer notre planète. L’utilisation des schistes comme combustible est une erreur écologique très grave, son impact sur l’environnement reste très mauvais, d’autant plus que certaines questions comme le stockage des cendres nocives reste en suspens. Au niveau international, l’expérience la plus connue est celle de la République d’Estonie où 90% de la production d’électricité provient de centrales thermiques fonctionnant aux schistes bitumineux ; d’ailleurs, ce changement de mode d’énergie s’est traduit par le retour de maladies chroniques : comme les crises respiratoires, des cancers et plus grave encore le retour du bacille de Koch (tuberculose).
Le budget de la santé de l’Estonie a été augmenté de 6,4% pour palier aux maladies dues à l’exploitation des carrières de schistes. Pour ce qui de l’extraction des schistes que renferment les sables (sable bitumineux), ces sables nécessitent des quantités considérables d’eau douce et d’énergie (souvent de gaz naturel) et pourrait tripler les émissions annuelles de gaz à effet de serre. Au Canada, plus de 4 000 km2 de forêts ont déjà été détruits au détriment de la lutte contre le réchauffement planétaire pour produire ce pétrole non-conventionnel créant un déficit de 1,3 milliards d’absorption de tonnes de C02. Des rivières sont détournées et polluées pour fournir les énormes quantités d’eau nécessaire à l’extraction et à l’exploitation du non-conventionnel.
Vu par satellite, de gigantesques trous béants défigurent la carte géographique canadienne, donnant l’air d’une planète galeuse ou les petits déserts commencent à naître. Ce n’est pas seulement l’environnement qui est détruit, c’est aussi la santé humaine qui est menacée. La présence de substances chimiques toxiques ou de métaux lourds comme le mercure dans les lacs et les rivières autour des sites d’exploitation compromet la qualité de l’eau potable, de même que la santé des animaux qui boivent cette eau et des poissons qui y vivent. Quand les humains consomment ces animaux ou ces poissons, ils ingèrent en même temps les substances chimiques que ceux-ci ont consommées.
L’exploitation des carrières schisteuses a crée des mines à ciel ouvert ou gîtent ces immenses déchets miniers toxiques. Des quantités colossales de gaz et de carburant sont nécessaires pour la survie de l’Amérique en quête d’énergie de ‘bonne occasion’ et elle n’a pas trouvé mieux que d’utiliser la bouse de vache pour sauver son économie dégringolant. Au final, les émissions de gaz à effet de serre sont énormes et inquiétant. La production d’un baril de pétrole issu des sables bitumineux est trois à cinq fois plus émettrice de gaz à effet de serre qu’un baril de pétrole conventionnel, mais les Etats-Unis d’Amérique préfèrent faire des économies au détriment de la santé de leur population et du bien-être des habitants de la planète. Un égoïsme démesuré si les américains pensent que l’environnement a des limites frontalières géographiquement déterminées et que chaque pays fasse ce qu’il veut sur son territoire.
Le réchauffement planétaire provoqué par les pays fortement industrialisée en occurrence les Etats-Unis et l’Europe et aussi ressenti par les lointains pays pauvres de la planète, ces dernier désindustrialisés dépouillés de leur richesses minières, émettent zéro (0) carbone dans l’atmosphère. Les riches et les pauvres se désolidarisent sur de l’équilibre de la balance de l’émission du C02, les Etats-Unis, l’Europe et la Chine de moindre importance ‘crachent’ dans l’atmosphère plus de 90% du volume mondial de rejet de CO2. Ils sont maîtres à bord des calamités naturelles et du réchauffement planétaire. Greenpeace dénonce ce crime environnemental et demande aux pouvoirs politiques de bannir les pétroles non- conventionnels comme les sables bitumineux et de réduire nos émissions de gaz à effet de serre!
Les américains veulent concurrencer le GNL avec de la bouse de vache
L’exploitation des gaz non conventionnels est une contravention infligée au protocole de Kyoto, écologiquement parlant ; mais économiquement il n’affectera pas le marché conventionnel du GNL. Longtemps, le marché du gaz est resté structuré et localisé, limité par le développement des réseaux de gazoducs entre les zones de production et celles de consommation. De grands efforts ont été consentis par les pays producteurs de gaz sur l’investissement des énergies propres plus particulièrement le gaz naturel qui égaille par sa ‘flamme bleue’ des millions de foyers à travers le monde. Cette même énergie tient promesse et participe efficacement au développement de l’industrie de pointes des pays fortement industrialisés et les pays émergeants.
Le GNL, transporté par méthanier, a ouvert un marché au niveau mondial. Les usines de liquéfaction se sont multipliées en Algérie et au Moyen-Orient, notamment pour répondre aux marchés américains et japonais et leur servir un produit hautement raffiné de bonne qualité. Le développement brutal, aux Etats-Unis, des gaz non-conventionnels pourrait remettre en cause les lourds investissements consentis pour le développement de l’industrie gazière mondiale, si la lutte contre le réchauffement planétaire s’affaiblie. Les gaz non-conventionnels pourraient en effet permettre aux Etats-Unis de se défaire des importations de gaz et attiser son échec sur la convoitise du pétrole du Golf Persique et devenir le premier pays exportateur de ce gaz sale et coûteux, une chance peut-être des pays exportateurs de gaz de qualité de voir les prix grimper au dessus des 100 dollars la Tep, seul de rentabilité du gaz non-conventionnel.
D’autant que le gaz naturel est envisagé comme l’une des énergies de demain, notamment pour produire de l’électricité (centrales associées à des techniques de captage, stockage de CO2, que recommande le protocole de Kyoto et la conférence de Copenhague) Le marché du gaz qui de se redessine aujourd’hui avec l’entrée ‘des hydrocarbures sales’ serait brouillant pour les perspectives à court, moyen et long terme. Brutalement la carte gazière s’est complètement transformée. Dans un premier temps, le développement du gaz naturel liquéfié (GNL) a ouvert un marché mondial en parallèle des marchés traditionnels régionaux (le transport par gazoduc limitait les échanges jusqu’alors) et des marchés spots aux côtés des contrats de long terme, rendant déjà imprévisible un marché qui jusque là était assez serein.
Aujourd’hui, c’est le développement des gaz non-conventionnels aux Etats-Unis qui perturbe le marché en créant une ‘bulle gazière’. L’exploitation de ces gaz aurait presque doublé en deux ans, modifiant la demande extérieure américaine. Cette évolution endogène ajoutée à une baisse de la demande mondiale en raison de la crise (-5 % en 2009), a en effet laissé de larges stocks de gaz, faisant chuter les prix. Aux Etats-Unis déjà, le charbon est désormais abandonné au profit du gaz, devenu compétitif et moins émetteur de CO2.
Le retour à l’utilisation du gaz non-conventionnel comparable au retour de la houille sur le marché, n’aura aucune chance de concurrencer le GNL, c’est une question d’appréciation de confort et de qualité. L’abondance des gisements et le coût peu élevé de cette ressource fait craindre à certains une exploitation massive du gaz au détriment des énergies ”propres” et un abandon des mesures d’économies d’énergie. Conclusion : Pour le moment, les pétroles non-conventionnels ne couvrent que 5% de la consommation et les coûts sont prohibitifs. Mais certains experts optimistes estiment qu’avec la raréfaction du pétrole, la hausse des prix permettra aux pétroles non-conventionnels de combler la différence.
La pollution générée va certainement restreindre leur utilisation jusqu’à ce que le déclin du pétrole soit vraiment avancé dans deux décennies peut-être. Cette alternative au pétrole conventionnel pourrait au moins être utilisée comme matière première et fournir les produits que les autres sources d’énergie ne peuvent pas (plastiques, engrais, etc.), bien qu’elle ne soit pas idéale en raison de l’intense consommation d’énergie nécessaire à la production, une fois le pétrole conventionnel épuisé, il s’agirait d’une des rares options pour l’après-pétrole américain. Le temps et l’argent nécessaires pour augmenter la production des schistes seraient énormes pour passer de 5% à 100%, mais suffisant pour alimenter leurs industries pétrochimiques en matière première, laissant l’énergie électrique aux sources renouvelables notamment: le solaire, l’éolien, et l’hydrogène etc. et au nucléaire, une fois la validation faite.
* Expert en énergie Algérian Society For International Relations
Publié dans Le Financier le 17 – 04 – 2010