Elles sont des milliers à errer dans les grands boulevards, les rues, les dancings, les hôtels de passe, les cabarets, en bordures de mer, de carcasses les véhicule, les gourbis, et aux alentours des résidences universitaires. Elles sont faciles à repérer, souvent, avec une tenue très légère, en plus d’un maquillage parfois offensant, qui attire l’attention des « prédateurs » et de simples curieux. Leur nombre échappe aux calculettes de l’Etat (pas de statistiques officielles).
Fuyant le mal et la mal – traitance des conjoints, des parents aux idées archaïques (patriarcat oblige !). La moyenne d’âge de ces filles de joie varie entre 18 et 45 ans, encore ces derniers temps, on voit apparaître des filles à fleur d’âge. La plupart de ces filles minettes se sont – en majorité – enfuies de la maison de leurs parents et/ou centres de rééducations. Dans la plupart des cas, elles se prostituent pour gagner de l´argent ou pour trouver à se loger.
Ces femmes aux mœurs légères (2) se retrouvent au bas du pavé ; avec comme seul gagne pain « le plus vieux métier du monde ! ». Cette phrase que l’on entend partout : « La prostitution est le plus vieux métier du monde » a pour seul but de justifier la marchandisation du corps humain.
Certaines villes algériennes – pour ne citer que les plus « médiatisées », (Oran, Tlemcen, Annaba, Bejaia, Tizi – Ouzou, Sétif, Sidi Bel Abbes, Alger, Bordj Bourraredj) sont devenues en l’espace de quelques années la plaque tournante de la prostitution, et pullulent, paradoxalement, de travailleuses du sexe, créant ainsi de nouveaux problèmes d’ordre sanitaire et sociétal, surtout après la fermeture de plusieurs – pour ne pas dire la majorité – des maisons de tolérance et aussi des bars discothèques, le phénomène s’est amplifié et est devenu incontrôlable ! Les endroits, où opèrent ces prostituées et leurs proxénètes sont connus presque par tout le monde. Les réseaux de la prostitution sont très bien organisés, bénéficient même de couvertures. Depuis 1995, on constate aussi un essor prodigieux d´hôtels de luxe, où la prostitution fleurit « légalement. »
Les opérations de sauvetage sont longues et compliquées pour ces filles qui risquent, très souvent, d’êtres poursuivies par une justice qui aurait dû au contraire les protéger. Méprisées par la famille et la société et ignorées par l’Etat algérien, elles n’ont souvent d’autres choix que de retourner dans la rue ou s’installer dans les hôtels ou maisons de location.
La gravité de cette situation nous interpelle tous et toutes et oblige à nous poser quelques questions : Qui est à l’origine de ce laisser-aller ? Est-ce les autorités ne sont pas au courant de ce fléau qui dégrade de plus en plus le corps de la femme et aussi les trottoirs de certaines villes ? Pourquoi ce silence de la part de l’Etat ? Qui est derrière la propagation de la prostitution à ciel ouvert ? Est-ce ce fléau prostitutionnel est étranger à notre société ? À qui profite ce réel commerce à ciel ouvert ? Que doit-on faire pour punir les fautifs (ves) ? Doit-on « corriger » les prostituées ? Pourrions – nous éradiquer et/ou réglementer ce phénomène tabou ? C’est ce que nous allons développer à travers cette contribution.
La prostitution est illégale selon le code pénal algérien ; son article 343 inflige « une peine de 2 à 5 ans et une amende de 500 à 2000 DA » pour prostitution et l’article 339 « de 1 à 2 ans » pour adultère.
Histoire de la prostitution :
Avant le christianisme, le mariage monogamique n’existait que dans la religion juive : Les femmes prostituées y étaient considérées comme des pécheresses. Au sein des sociétés primitives, l’hospitalité sexuelle était pratiquée de façon ordinaire, c’est-à-dire qu’il était fréquent d’offrir sa femme ou sa fille à l’invité que l’on accueillait dans sa maison. Cette pratique s’est transformée d’hospitalité sexuelle en prostitution sacrée. Les femmes se rendaient, dans cette époque là, au temple une fois dans leur vie pour offrir leur corps à une personne pauvre. Ce geste s’exerçait dans le principe du sacrifice, « l’offrande allait aux divinités ». Progressivement et avec les développements divers qu’ont connus les sociétés, la prostitution devient un phénomène social.
« A l’origine, il s’agissait d’une pratique ritualiste : faire vœu à la déesse de lui consacrer la première fille qui deviendra une protectrice pour la famille … ou pour avoir un fils (…) Mais la raison financière la plus importante est la prostitution qui, de religieuse, conduit ces femmes à travailler comme des prostituées ordinaires. La consécration leur donne une sorte de justification, puisqu’elles sont au service de la déesse (3) … »
Pendant l’époque où Louis IX régna, soit de 1226 à 1270, la politique face à la prostitution a changé, passant de la prohibition à la tolérance. Il menaça d’expulsion toute personne pratiquant la prostitution occasionnellement ou comme métier. C’est là que commença une dure répression, et la prostitution clandestine remplaça les maisons de débauche ouvertes à tous. Mais les plaintes furent nombreuses et sa politique se trouva devant l’échec : il était impossible de mettre fin à un phénomène si courant. De suite, il fut donc décidé de focaliser la prostitution dans certains quartiers, à l’écart des maisons de bonne famille et ouvrit aussi les portes d’un centre de réadaptation…
En Algérie après l’indépendance aussi … « La prostitution est devenue telle qu’on ne peut l’esquiver. Elle « dérange » en devenant trop visible. La présence importante de jeunes adolescentes à peine sorties de l’enfance poussée par la misère que l’on trouve dans des cabarets des petites villes de la côte Est encore hier plongées dans un provincialisme de bon aloi, femmes S.D.F et prostrées dans leur dénuement et l’abandon de tout espoir accroupies dans les centres-villes, toutes ces images et bien d’autres encore nous disent que la prostitution massive s’installe (4). ».
Qui poussent les filles à se prostituer ?
Le recours à la prostitution est le résultat d’une crise (pauvreté, dégradation du système d’entraide traditionnel, misère économique dans ses manifestations les plus dégradantes), d’une blessure (violence conjugale, agression, harcèlement moral et sexuel, la discrimination, inceste, viol, défloration accidentelle, avoir mis au monde un enfant hors mariage …), toxicomanie (le fait de consommer de la drogue implique une dépense d’argent parfois très conséquente) et l’appât du gain (le fait de se prostituer est un moyen « facile » de se procurer de l’argent). Tout cela a fini par créer cet environnement qui convient au pullulement des maux sociaux tels que : Les conflits familiaux, le suicide, la mendicité, la figue, le reniement, la prostitution … Le terrorisme aussi a été l’un des facteurs de propagation de la prostitution lorsque la victime arrive à s’échapper ou se fait libérer par les services de sécurité lors d’un ratissage.
En effet, lors des massacres des villages, durant la décennie noire, les groupes armés ont isolé les filles et les jeunes femmes pour les mener dans le maquis et ils les ont violées. Un communiqué de « l’émir » local du GIA illustre sinistrement la nature systématique de ces pratiques. Ce communiqué affirme l’autorité de « l’émir » qui lui octroie le droit de donner des femmes à violer […]. Le communiqué commence ainsi : « C’est l’Émir qui donne les femmes. » Il se poursuit avec des instructions sur les « règles » du viol : qui peut être violée, quand, et par qui (5) … ». De 1991 à nos jours, on dénombre plus de 6.000 femmes violées, dans des conditions barbares, par les terroristes. Les rescapées de ces pratiques barbares sont jetées dans leur majorité à la rue par des proches, incapables d’assumer les conséquences d’une telle situation
Se prostituer peut apparaître, aussi, comme une forme d’opposition à sa famille, comme une expression de colère, de révolte, voire comme une forme de suicide. La « réponse » prostitutionnelle « remède pire que le mal », ne fait que piéger la personne dans un cadre qui l’exploite, amplifier l’inadaptation déjà existante, produire de nouvelles difficultés, souffrances et violences.
L’« envahissement » des villes de Tichy et Aokas !
Quand on veut éviter de chercher une issue honorable au fléau prostitutionnel, qui commence à envahir – de façon spectaculaire – certaines régions côtières de Bejaia, telles Tichy et Aokas, nos décideurs le repousse loin de leurs regards pour laisser ainsi s’y installer la loi de la force et de l’anarchie, laissant les habitants des stations balnéaires, les plus prisées de la Wilaya de Bejaia, « rangés par ce mal sociétal » à leurs sorts !
En effet, à Tichy, le 05 mai 2011, vers 21 heures, des dizaines de jeunes commencent par fermer à la circulation la RN 9 reliant Bejaia à Sétif. Un rassemblement se forme ensuite devant le commissariat de la ville où la foule exige des policiers de mettre un terme au phénomène de la prostitution pratiqué ouvertement ou discrètement dans ces établissements. Quelques heures après, chauffée à blanc, la foule passe à l’acte. Des « bandes de jeunes » s’attaquent aux établissements hôteliers accusés de faire travailler des entraîneuses, souvent des jeunes filles venues des villes de l’Ouest ou de l’Est du pays, causant des dégâts matériels à quelques hôtels de la région. Une partie des habitants a applaudit la descente punitive et une autre partie s’en est offusque. Le lendemain de « l’attaque », le comité des citoyens, dans un communiqué rendu public, a réitéré le caractère « pacifique » de leur action qui n’est nullement dirigée contre l’activité commerciale des hôtels et autres lieux de boissons mais uniquement contre la prostitution et ses effets corollaires ». Tout en imputant la responsabilité du saccage des hôtels au « laxisme des autorités. »
De même, à Aokas, à moins d’une dizaine de kilomètres de Tichy, dans une déclaration rendue publique, des associations de la daïra dénoncent la prostitution. Ces associations signataires, disent que les pouvoirs publics ont été alertés « Lorsque des femmes de mauvaises mœurs venues de toutes les régions du pays étaient maintenues en des lieux clandestins liés à la commercialisation de la chair et du plaisir et s’affichaient en ville dans des tenues vestimentaires peu pudiques […] Aujourd’hui, c’est de l’envahissement, une incitation constante à ce fléau (…) sans que l’Etat ne s’inquiète ni des implications liées à la santé publique ni à ce ravage sur la moralité. Devant l’expectative générale, l’expansion de ce fléau atteint les recoins des localités rurales […] nous appelons les pouvoirs publics à mettre fin à cette attitude permissive. »
À noter que d’après les informations recueillies par nos soins, durant le mois d’avril 2011, avant le début des mouvements de protestation, il existe plus de 2000 prostituées qui circulent à Bejaia, dont une moyenne de 500 entre Tichy et Aokas. Bien entendu, ces informations ne sont qu’approximatives étant donné que ces calculs peuvent y être faussés par la mobilité fréquente de quelques travailleuses de sexe, par crainte d’être repérée, comme par exemple, par un ami proche de la famille, venu prendre ses vacances ou juste pour se souler. Il se peut même un fidèle client, mécontent de la façon du déroulement et/ou négociation du prix de la « passe », il l’a « trahisse », en donnant son adresse à un de ses proches …
Depuis les événements de protestation du mois passé, plus de 200 filles de joie ont désertée les stations balnéaires et se sont « réfugiées » à Boulimat et Bejaia–ville, en attendant que les choses se retournent à la normale. Par contre, celles qui sont restées, se contentent de se « déguiser », durant la journée, en « femmes normales » sous la djellaba, par crainte de « fichage » et faire leur travail convenablement à partir de la nuit tombée si la situation le permise.
À qui profite ce commerce charnel ?
La prostitution implique trois acteurs : la prostituée, le client et le proxénète ou chacun y trouve son intérêt. Cependant, en raison de l’illégalité et de la clandestinité dans lesquelles elle évolue, il est impossible de décrire parfaitement la réalité de la prostitution. D’autant plus que notre société traite, habituellement, le cas de la prostituée, plutôt que celui des deux autres protagonistes.
Le client demeure le grand inconnu du système prostitutionnel. Malgré son invisibilité, il est néanmoins à la base de toute relation prostitutionnelle. Pourquoi ignore-t-on le rôle clé qu’il joue ? Ne dit-on pas que le client est roi ?
Le proxénète (digne d’un chef de service d’une institution quelconque) est celui qui s’adonne au proxénétisme. Il consiste à favoriser la prostitution d’autrui pour en tirer profit. Généralement, ce dernier met à la disposition des prostituées adultes des appartements qui leur servent de « maisons closes », où elles peuvent recevoir, sans aucune gêne de simples citoyens et mêmes des personnalités locales et/ou régionales, pour abuser des minettes.
Le maquereau recours dès fois à la violence physique et à l’intimidation sur les femmes qui font partie de son réseau prostitutionnel. Le revenu de ce dernier est parfois faramineux. Il peut y atteindre la moyenne de 2000,00 à 5000,00 DA par jour et sans se fatiguer, un commerce très juteux !!!
Combien gagne sur « fiche de paie » la prostituée ?
Nos différents entretiens avec ces vendeuses de charme – rencontrées au littoral de Bejaia, nous ont permis de savoir que pour une moyenne de sept « passes » par jour, il arrive à la femme qui prostitue de ramasser jusqu’à 9 000,00 DA, mais en basse saison. Dès fois, un seul accouplement, d’une dizaine de minutes, avec une personne très aisée financièrement parlant, peut lui faire gagner jusqu’à 5000,00 DA ! En revanche, durant la période estivale, la vie sourie à tout le monde et personne n’est perdant (souteneurs, maquereaux, filles de joie, patrons d’hôtels, commerçants, coiffeuses, responsables des hammams …), le revenu journalier atteint – dès fois – les 20 000,00 DA. Bien sur, à déduire de ce montant les sommes à dépenser chez les salons de coiffure, les hammams, les habits … sans oublier le pourcentage à verser de la recette au maquereau (‘chikour’ en dialecte de rue) et aussi … le « salaire ! » à transférer à la famille (étant donné que certaines disent à leur famille qu’elles travaillent dans un restaurant comme femme de ménage et/ou serveuse !!
Le « net payé » mensuel de la femme qui prostitue dans les « maisons closes » non déclarées, rues et certains hôtels « reconvertis » en « maison de passe » varie entre 30 000,00 à 50 000,00 DA durant la basse saison et entre 80 000,00 à 120 000,00 DA en haute saison (les dépenses citées précédemment sont déduites)
Si l’on en croit les conclusions du sondage effectué par l’Institut ABABSA « L’Algérie compte 1,2 million de prostituées clandestines. Chacune faisant vivre autour d’elle 3 personnes. Les Algériens qui vivent directement ou indirectement de la prostitution sont 4 millions et sont âgés de 16 ans et plus (6) »
Un crime organisé qui rapporte énormément d’argent qui est blanchi dans d’autres affaires et qui touche tous les milieux sociaux.
La prostitution face aux maladies vénériennes.
Les maladies vénériennes, maladies sexuellement transmissibles (MST), rebaptisées actuellement infections sexuellement transmissibles (IST), sont des maladies infectieuses qui requièrent pour leur transmission des contacts interhumains étroits, comme ceux que réalisent les rapports sexuels. Des transmissions qui peuvent aller d’une affection sexuelle sans gravité à un syndrome d’immunodéficience. L’augmentation des atteintes sexuelles chez les prostituées est causée par la multiplicité des partenaires de ces dernières, d’un côté et de l’autre leur incapacité d’imposer à leur clients la nécessité d’utiliser des préservatifs par peur de perdre leur source de gain. Cette peur les pousse ainsi à faillir aux règles élémentaires de prévention. « Dans les villes où il y a garnison et beaucoup de célibataires par état ou par nécessité, la prostitution devient une sorte de mal nécessaire qu’on est obligé de tolérer pour en éviter un plus grand encore ; mais qu’il est indispensable de la soumettre à des dispositions constantes de garantie envers le public, sous le rapport de la santé et du bon ordre, afin qu’elle soit le moins nuisible possible. Cette nécessité de la prostitution une fois admise, on voit que ce sujet est capable d’offrir un grand intérêt au médecin observateur, sous le rapport de la morale, de la législation, de l’hygiène publique et de la population (7). »
Selon le professeur Abdelwahab Dif, président du Comité algérien de lutte contre le Sida (CNLS) : « Plus de 700 personnes sont atteintes de SIDA, et 2 092 sont séropositifs en Algérie, dont 682 sont traités, entre le 1er janvier et le 31 septembre 2006, on dénombre 282 décès depuis 1985 […] La situation des séropositifs et malades du SIDA s’est améliorée en Algérie ces dernières années mais ces personnes restent toujours frappées d’exclusion dans la société. De plus, sur 1 470 personnes qui se sont présentées cette année dans les 54 centres de dépistage mis en place par le ministère de la Santé, 14 étaient séropositives, selon le CNLS […] La société algérienne est « sans pitié » avec les porteurs du VIH, en les stigmatisant et les culpabilisant. Avec la prostitution, la drogue, la délinquance, le phénomène de l’immigration et la précarité le Sida prend de l’ampleur, quant au facteur qui contribue le plus au développement du SIDA c’est bel et bien l’ignorance (8) »
Le sida est rarement évoqué et souvent à mots couverts par la télévision algérienne, alors que certains imams dans les mosquées ne cessent de le présenter comme une punition divine pour les « fornicateurs » ; affirmant que la seule parade est l’abstinence.
Par ce fléau, il faut comprendre que tôt ou tard, les jeunes femmes qui prostituent – dans un cadre non organisé – finiront par contacter des maladies sexuellement transmissibles, vénériennes, respiratoires et grossesse non désirée, tous faits aggravés par l’âge et la durée de la prostitution. En plus du Sida, elles arrivent ainsi à une dépravation totale, avec une déchéance psychologique et physique qui les transforme donc en véritable loque humaine.
Les fameuses maisons de tolérance :
Avant, on entendait parler de ces lieux de prostitution bien définis et situés avec un ordre à respecter. Il fut un temps où les jeunes et moins jeunes allaient dans ces « bordels » pour trouver en l’espace d’une dizaine de minutes un plaisir charnel. Les prostituées n’étaient pas livrées à eux-mêmes et étaient astreintes – même – à des visites médicales (MST) très sérieuses deux à trois fois par semaine et ne pouvaient quitter leur « poste de travail » qu’après l’obtention d’une autorisation de sortie auprès des services concernés. A noter que le client est protégé du point de vue sanitaire. Elles sont contrôlées également par la police. Jusque-là, tout se passe dans une certaine discrétion et « complicité ». Hélas, après les années 90, les autorités n´ont pratiquement plus donné d´importance au phénomène de la prostitution. Pire, ils ont procédé, sous la pression de la montée de l´islamisme et du terrorisme, à la fermeture de plusieurs lieux : « Il est à souligner, à ce sujet, qu’à la vielle de l’Indépendance, prés de 171 maisons closes étaient réparties sur tout le territoire national. Aujourd’hui, il ne reste que prés de 19 de ces maisons qui exercent en toute légalité (9) ». Précisons à ce sujet que ces maisons n’ont jamais été interdites officiellement par l’Etat Algérien, mais simplement mises en veille, dans la discrétion la plus totale.
Éparpillées ici et là. Les prostituées les plus exposées sont celles qui font le trottoir ou sur les routes nationales.
Conclusion
Sujet tabou dans une société aussi conservatrice que la nôtre. Mais le casser serait, sans aucun doute, combattre un fléau dont les conséquences pourraient être désastreuses et dangereuse pour la société. Le meilleur moyen c’est d’aller « en guerre », contre ce fléau, avec l’esprit « gagnant -gagnant » afin d’y l’endiguer ! C’est-à-dire, l’amoindrissement, qui sera graduel, se fera de la manière suivante :
Le gouvernement algérien (secteurs concernés) doit :
– Engager sa responsabilité en réglementant clairement la prostitution, où toutes les parties seront gagnantes : Etat, société, femmes, conservateurs, démocrates …), car il est très facile de chasser les filles par la police, jeter la pierre aux souteneurs, aux maquereaux et autres pervers qui exploitent ces filles, et de laisser la situation se dégrader sans aucune politique de rechange.
– Appliquer réellement et dans la durée les mesures préventives concernant la réinsertion des prostituées. Si la réinsertion concerne l’ensemble de la politique sociale, elle doit aussi s’appuyer sur des services spécialisés, lieux ouverts chaleureux où les personnes peuvent trouver une écoute active. Ces espèces de parole agissent comme des lieux d’ancrage. Ils permettent en partenariat avec d’autres acteurs sociaux, de traiter la globalité des problèmes, tout en répondant, grâce aux outils de droit commun qu’offre notre société à l’urgence des réalités, travail, logement, santé, accès aux diverses prestations sociales …
– Organiser des campagnes d’information, de responsabilisation de l’opinion publique et de formation des acteurs médico – sociaux ;
– Prendre des mesures pour le logement, la formation et les moyens de substance des jeunes filles en situation de vulnérabilité croissante ;
– Instituer une journée symbolique annuelle pour la prévention de la prostitution.
« Depuis 1962, on assiste à une alternance des discours sur la prostitution, tantôt moralisateur sous prétexte d’assainir la rue, tantôt empreint d’un pragmatisme social, tantôt prétextant des objectifs de protection de santé publique. Ainsi, on passe d’un discours répressif à un discours plus tolérant avec des moments de pause où l’existence même de la prostitution est oubliée, voire niée, comme si une sorte d’amnésie frappait les ‘officiels’. Puis le discours resurgit sous une autre forme masquée, celle d’une tolérance douteuse. Désormais, on admet l’existence de la prostitution en tant que fléau social inévitable, que la seule façon de combattre étant sa reconnaissance officielle dans un réseau encadré, contrôlé et surveillé(11). »
Que ceux qui sont derrière la propagation de la prostitution ou concernés – de façon directe – par sa réglementation sachent que le corps de la femme n’est pas une marchandise …
Par Samir REKIK
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1. Barbara Christine de Conink, La partagée, éditions Minuit, Paris, 1977, 190 pages, P. 17 (cité par Sakina Messaâdi in Les romancières coloniales et la femme colonisée, éditions ANEP, 2004, P. 247).
2. On peut citer cinq (05) appellations spécifiques (vocabulaire populaire) connotées fort péjorativement avec cette idée de mépris servant à les désigner : les sales (khamdjat), celles qui se donnent (atayat), les putains (kahbât), les filles du péché (b’nat lahram), les gâtées et les pourries (el fadate).
3. Ramesh, 1991. Cité par Jacqueline des Forts, Violences et corps des femmes di tiers-monde, le droit de vivre pour celles qui donnent la vie, éditions ANEP, 2003, P. 179.
4. L. Abid (Professeur à la faculté de médecine d’Alger), Des maladies vénériennes, de la prostitution et du mythe des Ouled Naïl dans l’Algérie coloniale, 12 janvier 2007 http://www.santetropicale.com/sante…
5. Bob Herbert, Terrorism by the Book, New York Times, 30 novembre 1997.
6. La société dans un état de déliquescence avancé, la prostitution fait vivre des familles, quotidien algérien l’Expression, Mohamed Touati, 9 avril 2008.
7. L. Abid (Idem) ;
8. Plus de 700 personnes atteintes du sida en Algérie, quotidien algérien La Dépêche de Kabylie, Kahina Oumeziani, 30 novembre 2006.
9. Le Midi Libre, 19 maisons closes légales en Algérie, 27 août 2008.
10. Rabah Beldjena, La prostitution tisse sa toile dans les grandes villes, le phénomène prend des proportions alarmantes, El Watan, 30 avril 2009.
11.Saâdia et Lakhdar, « La prostitution, une aliénation coloniale » in L’aliénation colonialiste et la résistance de la femme algérienne, Lausane, édition la Cité, 1961. Ou encore, Aboulhassan, « La prostitution sous-produit du régime colonial », La République algérienne, n° 29, mai 1954.
– Cité par Barkahoum Ferhati, Ambivalence des discours politiques sur la prostitution (1962-2000) : L’histoire bégaie !, revue d’études et de critique sociale NAQD, femmes et citoyenneté, n° 22/23, automne / hiver 2006 (auteur d’une thèse « Lecture d’histoire sociale de la prostitution pendant la période coloniale : le cas de la prostitution dite Oulad Naîl de Bou-Saâda », 1830-1962, EHESS, 2002).
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Notes de renvoi
Prostitution en Algérie : de l’illusion à la désillusion, l’hebdomadaire le Régional, du 24 au 30/10/2002, de Samir Rekik ;
Ce mal qui congrène notre société prend de l’ampleur, prostitution : Un fléau et des questionnements, Racines Izuran, n° 24 du 18 juin au 1er juillet 2007, de Hafit Zaouche ;
De l’exploitation sexuelle des filles, Le Régional, semaine du 25 avril au 1er mai 2002 ;
Silence,… on les tue ! », quotidien L’Authentique, 23/03/2003, de Samir Rekik ;
La prostitution à Aokas, http://aokas-aitsmail.forumactif.info/forum, Hafit Zaouche ;
Algérie : Peut–on parler de démocratie sans l’égalité entre les deux sexes ? quotidien El Watan du 09/03/2001, de Samir Rekik ;
Quel sort pour les enfants recueillis légalement ? quotidien El Watan du 06/06/2011, de Samir Rekik ;
Silence … on frappe les femmes ! www.femmes.algeriennes.over-blog.com, de Samir Rekik ;
Algérie : Le harcèlement moral et sexuel au travail, yahoo actualités et le média citoyen Agoravox du 16/08/2010, de Samir Rekik ;
Viol, inceste et harcèlement sexuel : Quel sort pour les victimes ? quotidien El Watan du 17 et 18/12/2006, de Samir Rekik ;
Déclaration des associations de la Daira d’Aokas, http://aokas-aitsmail.forumactif.info/forum, mise en ligne par Hafit Zaouche ;
Espace dédié à la femme du nord africain, www.femmes.algeriennes.over-blog.com.
source
https://www.youtube.com/watch?v=u8OF4D6whtw