Charlie-Hebdo : le départ de quelque chose ?

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L’épouvantable choc provoqué, au sein de la société française, par le carnage perpétré au siège de Charlie-Hebdo, peut bien être exploité à des fins d’embrigadement de la population, dont on peut observer les prémices. L’expression « c’est un 11 septembre français ! » a tout de suite fusé, dans les propos de certains commentateurs. Elle est lourde de sens et laisse entendre qu’il est possible que le drame soit exploité, à l’instar du « 11 septembre » original, non pas que la France ait les moyens des Etats-Unis et pourrait cibler la destruction d’un quelconque Irak, mais plus prosaïquement d’une opération sur son sol. Un patriot-act hexagonal, par exemple, qui fera passer à la trappe un certains nombre de droits fondamentaux.

Dans les heures qui ont suivi les premiers commentaires et les premières supputations c’est un appel à l’union sacrée qui est lancé par l’Elysée, qui a invité les chefs de partis pour examiner la situation. Jeudi 08 janvier, le plus notable de ces chefs à rencontrer le président François Hollande a été Nicolas Sarkozy. Et lui, il a rajouté à l’hypothèse de lourdes présomptions sur ce qui pourrait se produire.A sa sortie de l’entrevue présidentielle, il a dit, textuellement, ceci : « Ce n’est pas une question de démocratie ou de république mais une question de civilisation…Il faut que les gens civilisés, quelles que soient leurs convictions, s’unissent face à cette barbarie fanatique ».

Les mots sont lourds de sens. Il faut tout de suite noter que la notion de « civilisation » va prévaloir sur celle de démocratie et de république. Le message est clair et s’il a dit ça c’est fort de l’échange qu’il venait d’avoir. Pour mieux être compris, il a ajouté que « c’est une guerre déclarée à la civilisation. La civilisation a la responsabilité de se défendre. »

Pour comprendre, il n’est pas utile de se torturer la pensée. La barbarie invoquée est clairement désignée par le glissement, suggéré, du profil des assaillants de Charlie-Hebdo vers les Français « issus de l’immigration ». Une catégorie de citoyens qui jouit des principes démocratiques et des lois de la république. Elle ne devra plus en jouir grâce à la priorité donnée à la « civilisation », porteuse des valeurs définies lors du débat sur l’identité nationale. Des valeurs confrontées à des comportements qui les mettraient à mal et menaceraient les fondements de la société.

Le même jour l’UMP publie une Déclaration solennelle où figurent ces mots : « aucun compromis n’est tolérable sur notre mode de vie, sur nos traditions, … ». L’allusion est clairement faite qu’il s’agit de mettre en coupe réglée la formation sociale française, car nulle part il n’est rappelé, comme de coutume, le droit à la différence. Le racisme, sous sa forme rénovée d’islamophobie, se réveille et ne se cache plus, prêt à déferler, si les conditions politiques lui étaient offertes. On parle déjà de guerre, en faisant l’amalgame entre les attentats djihadisteset les conduites islamiques (port du hidjab, exigence du hallal dans les cantines, mouton de l’Aïd El Adha…).

En prime, les Français dits « de souche », tétanisés par les sombres perspectives économiques, déstabilisés par l’extension de la précarité et livrés à l’anomie qui se répand, n’opposeront aucune résistance à la mise au pas politique et sécuritaire et à l’instauration de l’autoritarisme, s’ils ne contribuent pas à la chose, en croyant défendre la « civilisation ».

Ahmed Halfaoui

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