L’Algérie réinventée par la psychanalyse

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karim sarroub Le complexe de Mohamed
par Nathalie Georges-Lambrichs, psychanalyste,
membre de l’Ecole de la Cause Freudienne

Rien n’est comme prévu. Le texte file et très vite, quelque chose produit un léger décalage : imprévisible au début, il va bientôt vous servir de repère et vous accompagner, vadémécum entre la métropole et l’Algérie. On apprend assez tôt que le narrateur a d’abord dormi seul et déblatéré sur le divan de son psychanalyste ce qu’il avait à déblatérer pendant une longue traversée du désert, en France. Nous le voyons décider cela, puis se retourner sur cette boucle pour en former une nouvelle où il renoue avec les siens, enterre son père, se retrouve père d’un fils qui a l’âge de sa cure, dix sept ans, et amoureux d’une femme : Chloé.

Il court, il court, l’esprit de Mohamed, vivifié par son invention magnifique d’une Algérie plus forte que ses démons. Grand est le charme de sa course amicale, des stops où l’on mange et l’on boit en compagnie, en promenade, en voyage ou en visite. L’insolite est là, tranquille et brut, à disposition de chacun, qu’il se fasse son idée et son usage de la chose qui se trame au fil des jours et du temps, différente pour chacun, sans équivalent, hors de prix.

Tout a changé ou est-ce Mohamed qui, voyant ce qu’il voit, de ses yeux dessillés par sa cure analytique, décide d’assumer, pas sans la politique, la confusion du sexe et les embrouilles de l’amour ? Les choses de la vie, comme disait Georges Perec, sont campées, mais Mohamed n’a pas oublié, il n’a pas mis au rancart ce qui a fait de lui ce qu’il est décidé à devenir : quelqu’un. C’est donc tout naturellement que le mot de psychanalyse lui vient souvent aux lèvres et sous la plume. Mais qu’est-ce donc qui sous cette appellation si heureusement mal contrôlée par tout un chacun, existe avec ce caractère d’évidence et fait partie du paysage ? Que signifie la présence banalisée et donc inquiétante, un peu étrange et pourtant si familière de ce mot, tout juste centenaire ?

Des psychanalystes, donc, il y en a, chacun est comme il est. Pas sans attaches ni références précises, cela dit. On savoure ici leurs amarres. On fait connaissance, un peu, avec certains d’entre eux. Le cercle de la famille et des amis ouvre alors sur d’autres perspectives, où l’on croise des passants et aussi des malades. Chacun a un nom, un parcours, une logique. Une précision : nous en sommes en 2018, l’Algérie est devenue une démocratie, Mohamed, qui écrit en français, a cessé d’avoir honte de son identité, même si chacun de ses deux mots et leur alliance contre nature risquent de rester une énigme sans solution vraiment transmissible ou durable.

Nous visitons donc l’hôpital psychiatrique d’Alger où la folie a à nouveau droit de cité, en compagnie du narrateur, de Chloé qui est une psychanalyste, d’un psychanalyste, Gilles, qui aime Mohamed d’une amitié sans pourquoi, et du directeur de l’hôpital qui nous présente ses pensionnaires. Chacun témoigne d’une impasse que l’on peut qualifier simplement d’historique. Pendant ce temps, la cérémonie de l’enterrement du père s’achève. L’essentiel aura été remémoré, et tu.

Le récit court et brasse l’air entre les gens, dans les paroles et les silences. Cela ressemble à une manière de vivre, lentement déduite, et confortée par sa précarité même, installée au cœur des êtres qui parlent et respirent toujours seuls et parfois en compagnie.

De retour à Paris, Mohamed reçoit une carte postale de Gilles, resté lui, en Algérie :

« C’est la démocratie c’es sûr. Mais comme en France, la confusion règne encore un peu sur le plan sexuel. »

Or, le fils disait à sa mère : « Si l’amour tuait, il y a bien longtemps que je serais mort. », et celle-ci : « Tu vises quelqu’un en particulier ? » « Cet enfant sera sauvé par les livres et les mots », dit quelqu’un d’autre… « Ce sont souvent les parents qu’il faut guérir, pas les enfants » dit la grand-mère. « C’est vrai que les femmes servent de boussole aux hommes, on ne le dit pas assez » dit-elle encore. « L’amour ça rend les gens un peu bizarres » dit Mohamed, qui nous confie : « Comme je n’avais pas d’autres éléments de comparaison, j’écrivais à Mina que je l’aimais plus que ma mère. »

Ainsi sont célébrés comme trois clôtures de la parole, l’asile psychiatrique, la prison, la maison des poètes, bastions de la résistance algérienne, et d’ailleurs. Plus une, le divan.

Nathalie Georges-Lambrichs

Le complexe de Mohamed, Ed. Mercure de France
(article paru dans La revue de La Cause Freudienne -n° 70)

Mohamed & Oedipe, par Anaëlle Lebovits-Quenehen
Le complexe de Mohamed, par Faustine Amoré
Le complexe de Mohamed, par Max Véga-Ritter

Le complexe de Mohamed est interdit en Algérie

source : karim Sarroub

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