C’est en 2006 que j’ai découvert Louis Gauthier avec Voyage en Irlande avec un parapluie. Je n’ai, depuis, cessé de le suivre à la trace espérant comme lui me reposer un jour dans cette Inde qui nous appelle depuis des lustres.
Si je n’ai pas encore eu l’occasion de rencontrer Louis Gauthier, je continue à le suivre. Son dernier livre Voyage au Maghreb en l’an 1400 de l’hégire (1) paru aux éditions Fidès m’interpelle puisque je suis né dans cette région du monde aux bords de la Méditerranée.
Voilà donc encore un livre qui m’emmène dans des contrées proches et lointaines, mais toujours prétextes à m’interroger en fin de compte sur le qui suis-je?
Tout commence dans une chambre d’hôtel à Marrakech. Sur fond de lassitude, le narrateur s’interroge sur le pourquoi de cette halte marocaine qui l’éloigne de plus en plus de son but initial : l’Inde. La même question revient quand il atteindra l’Algérie et puis la Tunisie. À notre grand bonheur, le voyage ne s’arrête pas.
Pourquoi le voyage, se questionne le narrateur alias Louis Gauthier? Sans doute, écrit-il dès la page 21, « pour échapper à la facilité (…). Voir comment elle se débrouillait, toute seule, la conscience, quand elle perdait ses points de repère, quand personne ne lui disait ce qu’il fallait faire, ce qu’il fallait penser, quand elle se promenait en liberté loin de sa tribu, de son troupeau. »
Le narrateur en mal d’amour ne sait pas quoi faire exactement. Mais comme dans toute quête, ici, celle de l’Inde, il nous entraîne sur un chemin initiatique où nous rencontrons l’autre, notre semblable. L’auteur avait 35 ans, peut-être un peu plus ou un peu moins quand il a entamé sa traversée du Maghreb en l’an 1400 de l’hégire qui correspond selon notre calendrier à l’année 1980. Le livre a mis longtemps à voir le jour. 30 ans! Un long détour dans le temps pour arriver ici. Sans doute, est-ce pour l’auteur, une autre manière de continuer le voyage en laissant passer sous le filtre du stylo ou du clavier de l’ordinateur, les souvenirs qu’il voudrait partager.
Dans le récit qu’il nous propose aujourd’hui, le narrateur rappelle que ce voyage apparaît comme la « parfaite métaphore » de sa vie, « un voyage désorganisé (…) sans but ».
Sans but?
Louis Gauthier a ses façons de tourner en dérision nos petites vies avec ses ambitions et ses tourments. Et si la vie est ailleurs? Entendez : ici et maintenant. Finalement, l’Inde de notre adolescence, est-elle vraiment loin de nous? N’est-elle pas ici et maintenant? Sans doute, le voyage et la quête, ultimes séductions, sont un détour obligé que nous impose la vie pour enfin comprendre ce qui nous meut de l’intérieur, ce qui nous habite depuis toujours : la paix.
Mais nous ne le savons pas.