Djamila Abdelli Labiod : « La Réglisse de mon Enfance »

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La Réglisse de mon enfance, de Djamila Lachehab-Labiod

L’auteure de la Réglisse de mon enfance, Djamila Lachehab-Labiod, présentera son ouvrage demain, mardi 6 mars, à la maison de la culture Houari –Boumedienne. Le grand public est convié au débat qui suivera la présentation.

Afin de présenter et de débattre de son œuvre littéraire intitulée la Réglisse de mon enfance, Djamila Lachehab-Labiod donne rendezvous aux Sétifiens demain après midi, à la salle des conférences de la maison de la Culture Houari Boumediene. Cette rencontre littéraire, est organisée avec le précieux concours des associations Espace et Nebras. Le roman de Djamila Lachehab-Labiod traite essentiellement du récurrent problème de la double culture, lequel touche des milliers de jeunes gens qui sont nés sur le sol français mais sont souvent appelés à suivre leurs parents qui retournent définitivement en Algérie. Ballotés entre ces deux mondes, ces jeunes expatriés sont toujours à la recherche de l’autre partie d’eux-mêmes. Le livre de 220 pages, paru aux éditions El-Maârifa, permet au lecteur, à travers l’adolescente Lina, l’héroïne du roman, de plonger dans les méandres de la construction de la personnalité de cette catégorie de jeunes, pris en sandwich entre l’impératif culturel et le facteur géographique lié à leur existence et à leur mouvance. Réalisé sur fond autobiographique, la Réglisse de mon enfance est la première oeuvre littéraire de Djamila Lachehab-Labiod. La saga prend cependant une belle dimension sentimentale, avec ces grands moments de sincérité et ces élans nostalgiques où elle raconte ses ressentis, ses désenchantements et ses espoirs. Dans son récit, la romancière situe l’évolution féminine, victime des comportements archaïques puisés dans les coutumes ancestrales, titillant au passage la conscience masculine.

Exprimé dans un verbe juste et un style alerte, la Réglisse de mon enfance est le fruit de plusieurs années de dur labeur. Djamila Lachehab-Labiod a d’ailleurs révélé à la presse : « C’est mon premier enfantement dans le domaine de la littérature et j’ai dû attendre de 2001 jusqu’à juin 2011 pour le voir enfin publié. » Djamila Lachehab-Labiod, ancienne institutrice de français, est aujourd’hui femme au foyer, mère de trois enfants. Elle a interrompu ses études et son travail pour se consacrer à son foyer, mais sa passion pour la lecture l’a fait revenir à la littérature.

Source : Le Jeune Indépendant

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Djamila Abdelli-Labiod : « Mon livre raconte des moments douloureux de mon existence »

Djamila Abdelli-Labiod était institutrice de Français. Elle a quitté l’enseignement pour se consacrer entièrement à son foyer, mais sa passion pour l’écriture l’a fait revenir sur la scène littéraire pour écrire sa première œuvre littéraire.

La Dépêche de Kabylie : Votre première œuvre s’intitule «La réglisse de mon enfance». Qu’évoque-t-elle ?

Djamila Abdelli-Labiod : Ce titre évoque pour moi cette période d’insouciance de l’enfance, le plaisir lorsque nous possédons quelques pièces, et qu’il nous est possible d’acheter des bonbons. Pour moi, la réglisse qui se trouvait dans une petite boite en forme de dé, qui coûtait à peine cinq centimes, fut ma friandise préférée. Mais je crois, que si je devais aller au fond de ma pensée, pour traduire mon ressenti par rapport à la réglisse ; je dirais que la réglisse est en quelque sorte le lien symbolique que je veux garder avec mon pays natal : La France.

Qu’est ce qui vous a inspiré pour écrire cette œuvre ?
Avant de répondre directement à cette question ; je me permettrai un petit préambule. J’ai emmagasiné des souvenirs de mon enfance, de mon adolescence, et chaque souvenir, qu’il m’ait marqué ou pas, comporte une charge émotionnelle. Et, à un moment de ma vie, sans savoir pourquoi, j’ai eu ce besoin de décrypter selon ma compréhension, ma sensibilité, par des mots ce qui dans ma vie m’a le plus marqué. En vérité, je me suis mise inconsciemment à coucher sur du papier, par des mots ce qui a eu impact favorable ou pas dans ma vie. Je dis inconsciemment, car j’écris réellement pour le plaisir, sans me rendre compte que je raconte au fur et à mesure, des moments douloureux de mon existence, de façon subjective, bien sûr. Car Lina qui est le personnage principal du roman, me raconte, mais, raconte aussi d’autres personnes dont le parcours de vie m’a touchée. Le réel et la fiction s’imbriquent entre eux. J’ai d’abord écrit une nouvelle intitulée, «retrouvailles» qui fut publiée sur trois sites. Un internaute, ayant lu ma nouvelle, me lança un défi, celui d’en faire un roman. J’ai relevé le défi, point par orgueil ou par fierté, mais pour la femme au foyer que j’avais choisi d’être pendant très longtemps, cela représentait pour moi un challenge en plus d’être quelque chose de ludique. J’ai, pendant longtemps, caressé le rêve de devenir comédienne, mais n’ayant pas pu réaliser ce rêve, je dois dire, que lorsque j’écris, et que je campe mes personnages, c’est comme si je jouais à travers eux, un rôle. Combien il est jouissif de contrôler le devenir de mes personnages, car d’une certaine manière, c’est comme si j’apportais une compensation, à certains aspects de ma vie que je n’ai pas pu contrôler.

Durant votre conférence à Aokas, vous avez dit «Les femmes ont besoin des hommes pour retrouver leurs droits». Parlez-nous un peu de ce combat que mènent les femmes, sachant que le personnage principal de votre roman est une femme «Lina».
Effectivement, les femmes ont besoin des hommes pour retrouver leurs droits. Et, il faut dire franchement que notre société est régie par les hommes même si la femme participe à la vie publique dans différents domaines. Les lois, qui donnent des droits à la femme, sont conçues essentiellement par des hommes, qui souvent semblent prendre conscience de leurs aspirations, mais ne tiennent pas compte de leurs réels besoins. Les mentalités évoluent, les lois devraient suivre. Pour conclure, je dirais que je suis mal placée pour orienter les législateurs ou les instances concernées quant aux lois qui accorderaient ses droits à la femme. Et, je pense n’avoir aucune légitimité pour m’ériger en porte-parole des femmes.

Quels sont les auteurs qui vous inspirent?
Les auteurs qui m’inspirent sont nombreux, mes lectures sont éclectiques. Pour en citer quelques uns, je dirai : Steinbeck, Han Suying ; Pearl buck ; Zola ; Oscar Wild ; Joys, et pour les auteurs algériens je dirai : Yasmina Khadra, Rachid Mimouni, Sansal; Anouar Benmalek, Malika Moukaddem et bien d’autres encore….

Que veut dire pour vous le mot «écrire»?
Quand je me mets à écrire, c’est d’abord ludique et au fur et à mesure que des idées intéressantes me viennent, que je suis touchée par la grâce de l’inspiration, si je puis dire, l’acte d’écrire devient jubilatoire puis libérateur.

Quels sont vos projets futurs ?
J’ai entamé mon second roman. Mais, je dois avouer que je n’écris pas de façon régulière, car la vie de famille grignote parfois trop de mon temps.

Un dernier mot pour vos lecteurs et lectrices ?
Je dirai à mes lecteurs et lectrices : Croyez en vous, faites que l’espérance et le rêve fassent partie de votre quotidien. Car le rêve nous permet de supporter des moments difficiles, lorsque nous sommes confrontés à une réalité douloureuse de la vie. L’espérance vient du rêve. Le rêve c’est l’espérance, me semble-t-il !

Propos recueillis par Reda Senoune ; Source


Djamila Abdelli Labiod : «Mon roman est une autofiction»

Le premier livre de Djamila AbdelliLabiod commence comme un roman. Lina, adolescente de 17 ans, est tiraillée entre l’amour filial, les devoirs envers ses parents et les élans irrépressibles de son cœur qui protège ses secrets.

Vous avez tardé quelque peu à publier votre premier roman, quelles en sont les raisons ? 

«La Réglisse de mon enfance» est le rescapé de trois naufrages. Quatre contrats furent signés en bonne et due forme. J’ai résilié le premier car la maison d’éditions a censuré des passages concernant des récits sur la femme. Le roman a été vidé de sa substance, pour être transformé en une histoire d’amour à l’eau de rose. Mais cela m’a été bénéfique et  m’a permis de retravailler le roman.

La deuxième maison d’éditions qui devait l’éditer a fait faillite, malheureusement. Le projet n’a pas pu aboutir. Il a été édité ensuite par les éditions Maârifa sous une première version, les milles exemplaires ont tous été vendus.

Puis, j’ai fait une deuxième mouture, et j’ai dû galérer pour trouver un autre éditeur. Croyez-moi, c’est un véritable parcours du combattant… Et j’avais cru, toutefois, avoir trouvé un éditeur, cependant qui m’avait posé une condition: changer le titre. J’ai dû refuser car ce titre a pour moi une valeur sentimentale. La Réglisse de mon enfance évoque l’enfance, ses joies, ses amusements. Lorsque l’on devient adulte, on voit finalement son enfance comme un conte de fée, me semble-t-il. Le titre est aussi le lien symbolique que je veux garder avec mon pays natal, à défaut d’un lien juridique, mais je l’ai fait de manière inconsciente. Un élan du cœur. Et, enfin, les éditions Baghdadi ont accepté de me donner une seconde chance, en éditant le roman sous une nouvelle version. Permettez-moi, au passage, de remercier vivement  Mohammed Baghdadi.

Lina, la narratrice, qui prend la parole dans votre livre, a eu un parcours semblable au vôtre. S’agit- il d’«une autobiographie masquée» ?

Il ne s’agit pas d’une autobiographie masquée car c’est une autofiction. L’autobiographie et la fiction s’imbriquent. Je suppose que j’ai dû, d’une certaine façon, utiliser l’autobiographie comme support au récit, étant ma première création littéraire. Mais pas que. Pour être honnête, je voulais sans doute à travers certains récits apporter des témoignages sur les différentes thématiques soulevées dans le roman. Dans la première mouture des éditions Maârifa, j’ai employé la troisième personne du singulier pour le personnage principal, Lina. On aurait pu dire, effectivement, que la partie autobiographique était une autobiographie masquée, une sorte d’autocensure, malgré moi. Mais pour cette dernière mouture, où j’emploie le «je», j’assume entièrement la partie autobiographique, sans pour cela que le lecteur puisse deviner où se situe la part autobiographique et la fiction.

L’amour tient une place importante dans votre livre mais il est vite supplanté par le torrent de souvenirs, de réflexions sur la société. A quoi obéit cette rupture dans le déroulement du récit qui laisse un goût d’inachevé ? 

Peut-être que l’histoire d’amour n’était qu’un prétexte pour justement raconter la société, les ankyloses de la tradition, certains archaïsmes. Enfant, Lina voit des choses qui la bouleversent mais sans vraiment comprendre comme cette femme qui est répudiée n’a pas le droit de garder son enfant, car selon la tradition, pour les parents, dès lors que leur fille est répudiée, l’enfant est vu comme celui de l’homme qui l’a répudiée, mais plus le sien. Quand elle devient adolescente, ses souvenirs ont gardé leur charge émotionnelle, et elle décrypte enfin ce qui l’avait effrayée petite fille. Elle a peur de subir un jour le même sort. D’ailleurs, elle dit bien «gommer toutes ces formes qui me rendent femme, ne ressentant la sécurité qu’en étant petite fille». En outre, elle fait un régime drastique, elle devient presque anorexique, et c’est à partir de ce moment qu’elle est sauvée par l’amour, car son idylle n’aime pas les filles maigres. Lina a peur de subir le même sort que ces femmes qui n’ont pas pu choisir leur idéal de vie ou suivre leurs aspirations.

Vous n’êtes pas la première romancière à défendre les droits de la femme, le sujet ne risque-t-il pas à la longue de charrier seulement des clichés ?  

Je vous réponds, non. Un non catégorique. Parce que malheureusement, ces schémas existent encore dans notre pays. On oblige encore des jeunes filles à ne pas continuer leurs études, d’autres à épouser un homme qu’elles n’ont pas choisi. Le mot cliché est peut-être dans l’air du temps, mais croyez-moi, j’ai vu des jeunes filles avec un potentiel intellectuel fabuleux qui ont été obligées d’interrompre leurs études. Peut-être sont-elles des exceptions, je ne suis ni psychologue ni sociologue pour affirmer ou infirmer cette possibilité. Je ne défends pas les droits des femmes. Je n’ai pas cette vocation. Mon récit n’est pas un réquisitoire dans le but de défendre les femmes. Je fais juste un constat sur les difficultés que rencontrent les femmes dans leur vie, leur quotidien. J’ai le droit de me sentir directement concernée par ce qu’elles vivent, étant moi-même une femme. Car Lina, par exemple, elle a peur de devoir épouser un homme qu’elle n’aurait pas choisi, J’ai choisi une fin ouverte pour mon récit, pour donner la possibilité au lecteur d’imaginer sa propre conclusion, comme il la rêve, ceci pour donner de l’espoir. J’ai aimé ce commentaire cri de colère d’une ado, mais pas que, de révolte aussi. Ce roman m’a permis en quelque sorte de donner la parole à ma mère, à ces femmes, auxquelles la parole est confisquée. J’ai choisi une fin ouverte pour mon récit,  pour donner la possibilité au lecteur d’imaginer sa propre conclusion, comme il la rêve, ceci pour  donner de l’espoir. J’ai aimé ce commentaire cri de colère d’une ado mais pas que, de révolte aussi. Ce roman m’a permis en quelque sorte de donner la parole à ma mère, à ces femmes, auxquelles, la parole  est confisquée.

Lina est écartelée entre ses identités. Où réside le salut sinon dans l’amour ?   

Il n’y a pas de salut, l’identité est une chose, l’amour en est une autre. Le déchirement culturel, ou le déracinement subsiste en moi de manière définitive. Je dis moi, car les passages ou textes se rapportant au déracinement sont évidemment autobiographiques. Renoncer à ma première appartenance culturelle dans laquelle je me suis construite serait comme m’amputer d’une partie de ma personnalité ou de mon affectivité. Aimer mon pays natal, la France, ne m’empêche pas d’aimer et d’être fidèle à mon pays d’origine, l’Algérie. Cela ne s’explique pas, c’est viscéral. J’aimerais vous donner une illustration quant à tout ce chamboulement que ressent un déraciné. Vous savez combien il est important pour un enfant de nourrir son imaginaire. Petite fille, on me parlait de la fée, de la sorcière, du père Noël. J’y croyais comme tous les enfants de ce pays. Lorsque je viens en Algérie, à l’orée de la pré-adolescence, on me dit que tout cela n’existe pas, c’est déroutant pour un enfant. Faut-il se reconstruire une autre personnalité avec les nouveaux codes culturels. Oui, Lina assimile les nouveaux codes culturels, car elle ne veut pas être en porte-à-faux avec les valeurs traditionnelles transmises par son éducation. Cependant, sa première appartenance culturelle fera toujours partie du noyau de sa personnalité.

Entretien réalisé par H. Rachid : Source

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