Expliquer la barbarie au peuple

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par Jamouli Ouzidane

« Un gouvernement libre ne saurait se maintenir s’il n’est pas, par ses propres lois, capable de correction… Un empire fondé par les armes a besoin de se maintenir par les armes. », Montesquieu

Le prince et ses deux formes de pourvoir : Dictature et Démocratie

Le Prince, c’est le Pouvoir dans ses 2 faces du même visage :

– La dictature physique répulsive : on peut le voir dans le Monde Arabe avec ces dictatures militaires, mais surtout chez ces Princes du Qatar et de l’Arabie obscurantiste. Le despotisme oriental reste la première forme d’asservissement de l’humain restée archaïque dans ces peuples nomades qui dépensent leurs pétrodollars dans la consommation perverse au lieu de penser à rejoindre la modernité dans ces sociétés de savoir.

– La démocratie soft attractive : celle des financières, des lobbies, des médias populistes, des politiciens partisans, des intellectuels attitrés, des idéologies et des idéalismes.

L’occident a évolué son mode de gouvernance vers la séduction technologique ; ce rêve américain de consommation et de l’entreprise néolibérale. Ce rêve a engendré un cauchemar dans ce 1% de la population qui asservisse les 99% de citoyens par le travail ; la peur de perdre son travail avec cette robotique qui sen vient, la concurrence mondiale de la Chine, les délocalisations …

L’occident a montré jusqu’ici une adaptation sociale aux mouvements des masses. On ne sait si cette adaptation va survivre les mutations profondes qui sont maintenant à l’échelle de la planète.

On ne peut toutefois comparer la vie sociale en Arabie avec celle de l’occident ! La démocratie doit juste devenir plus humaine pour le peuple et non seulement plus prospère pour le capital quelques soit son prix ; croisade, colonisation, et chaos dans les pays du Sud … C’est l’Injustice sociale de cette déchirure entre pauvres et riche qui créera la révolte. C’est inadmissible, intolérable et injuste que 8 personnes sur terre aient la moitié de la richesse du monde.

Psychanalyse des relations entre le Prince et le peuple

Le prince joue le rôle du père:

– il représente l’autorité

– il accapare la parole et la décision

– il distribue les avantages selon ses préférences

– il ne supporte pas la moindre contestation

– il écarte les contestataires

Il se comporte aussi comme une mère: il affectionne, protège, couve, et favorise ses plus fidèles enfants.

Nous parlerons de la forme brutale de la dictature qui existe encore au Moyen-Orient avec ces Princes wahabis obscurantistes moyenâgeux qui forment toutefois une belle alliance avec un monde occidental démocratique ; ce qui prouve que ces deux modes de gouvernance ne sont pas antagonistes, mais bien les deux faces d’un même visage.

La crainte du système :

Le Prince paraît être un génie puisqu’il a pu déjouer d’innombrables coups d’État et révolutions. En réalité, ce génie est particulier, car il n’est pas un génie d’esprit, mais d’insanité. Ce génie est fondé sur une seule base : la terreur (religieuse) !

1/ Le terrorisme de groupe oblige l’individu à se soumettre aux valeurs, croyances, et opinions du groupe et donc du Prince. Le harcèlement moral (« mobbing » ou « stalking » en anglais) est réprimé par la loi divine en orient et démocratique en occident. Ce harcèlement conduit à la destruction psychique de l’individu par une « violence » sans traces ; le manque de sens, la solitude, la survie, l’angoisse, le stresse, la drogue, la violence, le suicide…

2/ Le Prince a plus besoin de citoyens ignorants que de savants, car il ne se fortifie que par ceux qui ne connaissent pas sa faiblesse. Il a besoin toutefois de gens formés pour ses usines, mais  non instruits pour penser le remettre en cause.

3/ Pour montrer sa force au peuple, le Prince a besoin de violence. La violence est sa seule crédibilité. Il légitime la violence seulement de sa part tout en mettant dans l’illégitimité toute autre forme d’opposition qui n’émane pas de ses lois.

Le Prince est une brute qui ne survit que par son instinct de violence. La violence injuste du Prince terrorise le peuple par la peur de la peur jusqu’à ce que le seuil de cette peur soit dépassé. La contre-violence s’installe alors dans la révolution qui sera réprimée dans le sang par un Prince qui ne vit que par et pour cette dualité: violence et contre-violence

4/ Les rivalités et les animosités sont brodées entre les citoyens en leur faisant les mêmes fonctions ou en interconnectant leurs cercles de compétences. Le maître va donc multiplier les complots, les diversions et les ambitions.

Pour cela, il fabriquera plusieurs parties de la même tendance qui s’annihileront dans la suprématie. Qui est alors plus démocratique que la liberté? Plus socialiste que la société? Plus nationaliste que la nation? Ou plus religieux que Dieu lui-même? Qui est alors le plus juste ? : la nation, le socialisme, le nationalisme ou la religion ?

L’opposant devient l’ennemi qui fait vivre le Prince. On sait que si l’ennemi part, on a plus de raison d’exister ! N’est-on pas beau seulement parce l’autre est laid ? Chacun va créer une hostilité pour attiser les faveurs de son maître. La diabolisation et la divinisation sont les deux mamelles du pouvoir.

Le prince fera de sorte que tout le monde devient ennemi de tout le monde ! Ceci s’appelle « diviser pour mieux régner » (« divide et impera », ndlr). Le sage maître est quémandé pour jouer le rôle de juge dans les conflits qu’il a lui-même enfantés, nourris et prémédités.

4/ Les masses qui ne sont pas affiliées dans le clan du Prince sont ignorées. Cette masse se contente des miettes de la fiesta. Cette masse ne représente aucun danger pour tout pouvoir, et ne peut donc être utilisée pour tout autre clan. Sa conscience est dépourvue de toute résonance sociale. Elle accepte n’importe quel berger et supporte n’importe quelle humiliation. Il faut juste l’occuper à s’alimenter comme on le fait si bien dans un poulailler ou une ferme à vache qui ne se révolte que lorsque la semoule manque.

L’humain devient une misérable régression dans sa fusion dans la masse. Il se plie à la bestialité du Prince comme se pliaient avant les primitifs aux divinités animales. Pascal parlait ainsi de la misère :

« Bassesses de l’homme jusqu’à se soumettre aux bêtes, jusqu’à les adorer. »

Pour se faire adorer, il faut se faire craindre. On adore les dieux beaucoup plus par crainte de l’enfer que par récompense du paradis. Le Prince, comme Dieu doit faire « croire » à tout prix au peuple sa force et même sa férocité plus que sa justice. On montre et on répète sans cesse aux peuples la force infernale du Prince qu’il finit par la « croire » dans ces exécutions, ces lynchages et ces lapidations publics.

Le Prince sait que le peuple peut se soulever contre l’injustice mais jamais contre la terreur. On n’obéit à la terreur plutôt qu’à la justice. C’est la seule chose que le barbare a apprise des animaux ! Il a mal appris, car les animaux obéissent à la nature et non à la barbarie ! Dans la nature, il n’y a ni injustice et ni révolte ! Trop de terreur engendre la révolte.

5/ Les compétences pouvant représenter un danger potentiel (soit par la prise du pouvoir ou soit pour la prise de conscience des masses) sont mises à l’écart par un harassement continuel. Le pouvoir manipule les masses en diluant les rumeurs, les mensonges et les calomnies pour diaboliser les esprits libres. On rend ainsi l’opposant comme un fou pour dire qu’il est violent et légitimer ainsi la contre-violence contre lui.

La masse se chargera d’emmener au bûcher ses génies dans un décor hollywoodien sous le mythe du sacrifice dans la violence et le sacré de René GIRARD :

Les hommes transfèrent sur le bouc émissaire la responsabilité entière du mal, après son sacrifice ils transfèrent sur lui la responsabilité du bien.

6/ Le pouvoir machiavélique est un pouvoir très instable. On assiste alors à la chute du père et à l’arrivée du « fils » qui veut copuler les femelles du bétail dans cette masse sans âme, sans conscience et sans lumière. Le « fils » ne vient pas d’une filiation héréditaire, légitime ou humanitaire, mais plutôt d’une filiation bestiale, impure et débile.

Sociologie du Prince

« Il faut qu’il (le Prince) bâtisse de nouvelles villes, qu’il détruise les anciennes, qu’il transplante les habitants d’un lieu dans un autre; enfin qu’il ne laisse rien dans cet état qui ne subisse quelque changement, et qu’il n’y ait ni rang, ni grade, ni honneur, ni richesse que qui le possède ne les tienne du conquérant. Il faut qu’il prenne pour modèle Philippe II de Macédoine, père d’Alexandre le Grand, qui avec ses moyens, de petit roi qu’il était, devint le maître de la Grèce. » Machiavel, Le Prince

La sociologie et la psychanalyse sont des sciences capitales pour la compréhension des phénomènes de pouvoir.

Des villes seront rasées radicalement avec leurs bâtisses et leurs cimetières. Les vieillards, les bébés, et les femmes qui restent seront affamés. Le vainqueur enchaîne à sa Jeep sa proie et la fait défiler dans les villes de néon en fête. Les disparitions, les tortures, les persécutions laconiques, et les profanations déchirantes des droits de l’homme sont monnaie courante. On veut terroriser la victime et lui montrer son sort s’il sort des lois de son Prince : les lois de la république populaire et démocratique.

Le Prince, comme Dieu, détient la vie dans sa main. Les victimes sont envoyées aux lions dans cette arène avec les ovations d’un auditoire en délires. Je vois des cadavres calcinés, des organes arrachés, des orbites dénudées et des résidus de cendres. Le peuple reçoit toutes terreurs obscurantistes et modernistes. Accablé, éreinté, et échiné par l’écrasement, l’impuissance, et la débâcle, la foule désordonnée reste à terre, inanimée, gémissante et sans défense devant la gloire, l’orgueil, les acclamations et les lois divines du Prince.

Les groupes et les clans sont les éléments indispensables pour acquérir et puis garder le pouvoir. Ces clans étaient basés en général sur des affinités tribales et régionales. Cet aspect a été largement exploré par Ibn Khaldoun dans la sociologie nord-africaine. La cohésion sociale était assurée par un « consensus social » où le Prince garantit la sécurité d’une insécurité qu’il a lui-même créée et entretenue. Pour cela, le peuple accepte de se soumettre. Ce consensus instinctif se trouve menacé par des facteurs psychiques. En effet, la sociologie dynamique nous montre que d’autres affinités naissent sans cesse avec le temps; religieuses, linguistiques, politiques, culturelles, psychologiques et maintenant tout est bouleversé par Internet qui crée de nouveaux « sites » et de nouveaux « web » humains.

 » Le propre du tyran est de repousser tout ce qui témoigne d’une âme fière et libre. « , Aristote

 » Tandis que les deux rois faisaient chanter des Te Deum chacun dans son camp, il passa par-dessus des tas de morts et des mourants. « ,, Voltaire

 » Si mon père conquiert tout, que me restera-t-il à faire moi ? « ,  Alexandre le Grand

 » Oh ! combien de marins, combien de capitaines qui sont partis joyeux pour des courses lointaines. Dans ce morne horizon se sont évanouis ! Combien ont disparu, dure et triste fortune ! dans une mer sans fond, par une nuit sans lune, sous l’aveugle océan à jamais enfoui ! », Victor Hugo dans « Les Rayons et les Ombres

Dans une dictature, les citoyens perdent leur âme. Machiavel disait : « J’aime ma patrie plus que mon âme. » Il ne s’agit pas d’une singularité qui se solidarise avec le groupe, mais d’une singularité qui s’efface dans le groupe pour perdre son âme ! Dans une dictature, tout est mensonges, peurs et ennuis ! La réalité se dissimule sous le masque de la séduction, de l’ivresse, de la sublimation, de la terreur et de la perversion !

Dans une dictature, les citoyens perdent aussi leur corps. Le dictateur n’a rien de valeureux. Les anciennes guerres tuaient des soldats étrangers, armés et volontaires dans des combats d’honneurs. Le dictateur utilise des mercenaires « frères », « cousins » ou « camarades » qui exterminent les enfants, les femmes et les vieillards de leur propre peuple. Le meurtre est lâche, ignoble et inhumain. C’est une sale guerre qui doit être plutôt considérée comme un crime contre l’humanité !

Pour asseoir son règne, le Prince insiste sur trois choses: la nécessité de la souveraineté nationale, un État centralisé et une mission politique dirigée par sa famille et sa tribu. Le Monstre remplit donc une disposition génétique par le sang, une position fonctionnaliste par l’administration et enfin une attitude typologique par le centralisme. Il crée ainsi un univers sans histoire qui fonctionne par la tradition, le mythe et le transfert.

Le Monstre se prend pour Dieu. Le pouvoir devient sacré avec des rituels magiques dans l’usage du pouvoir. Pour asseoir son règne dans l’éternité et dans nos mémoires, comme tous les Dieux, le Monstre construit une architecture d’inclusions et d’exclusions.

par Jamouli Ouzidane

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