Jamouli Ouzidane
« Ainsi, voilà l’espèce humaine divisée en troupeau de bétail dont chacun un chef qui le garde pour le dévorer. Le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maitre, s’il ne transforme sa force en droit, et l’obéissance en devoir. Céder à la force est un acte de nécessité, non de volonté. Renonce à sa liberté, c’est renoncer à sa qualité d’homme, aux droits de l’humanité, même à ses devoirs… « , Rousseau, le contrat social
On a raté les deux siècles passés de révolutions politiques et industrielles dans le monde.
Nous avons été colonisés plus d’un siècle et nous sommes restés toujours dans un sous-développement chronique depuis un demi-siècle avec en prime un système politique primaire qui a fini par engendre une décennie noire.
Que se passe-t-il à ce peuple et ces générations successives de la honte ? Est-il à ce point congénitalement incapable de se libérer des autres et surtout de lui-même pour rentrer enfin dans la modernité ?
Nous avions tout pour réussir ; une indépendance, une démographie de jeunes potentiels, des ressources naturelles inimaginables quand d’autres pays sous-développés moins nantis ont réussi leur développement et miracle sud-asiatique !
Nous essayerons ici de résumer les points focaux qui font qu’un pays est presque condamné à rester dans un sous-développement permanent depuis des siècles. Connaitre les points faibles de son organisme, nous permet d’en être conscient et ensuite de nous guérir. Ne rien faire, c’est commettre un suicide et un crime contre sa progéniture.
Histoire ; L’algérien n’a pas l’âme guerrière !
Une histoire infinie de colonisations sous des formes diverses. L’Algérie semble ne jamais avoir été libre même quand elle a été indépendante ! L’algérien a toujours été soumis et incapable de prendre son destin local en main. Il préfère la fonction d’esclave à celle de maitre, car la vraie liberté exige un combat de survie perpétuelle contre des prédateurs éternels.
L’algérien n’a pas l’âme guerrière ; quand il fait un combat, il ne le finit jamais. La guerre d’Algérie n’a jamais été finie. Elle s’est arrêtée dans une indépendance confisquée. Le printemps algérien s’est arrêté dans un bain de sang non pas contre l’étranger, mais contre nous -autres. L’algérien est fatigué, il veut juste survivre sous la douceur d’un maitre compassionnel qui lui promet une sécurité sans paix et une survie sans réelle prospérité.
Politique ; du socialisme au libéralisme !
Un début plein d’espoir avec Benbella mais déjà un coup d’état de Boumediene, un dictateur éclairé, qui se sent investit de la mission divine de sauver la nation d’elle-même. Une période florissante pour plein de dictateurs qui vont naitre dans le monde arabe et africain postcolonial.
Boumediene avait le mérite au moins de mettre la société dans le travail, mais, en empruntant une voie socialiste à la soviétique, prit dans l’étau de la guerre froide. Boumédienne avait au moins la bonne foi, mais pas la bonne vision et encore moins les bons outils. La bonne foi ne suffit pas. Elle peut même être un danger de despotisme quand on justifie ses moyens ignobles par ses fins nobles. On ne peut toutefois le juger en dehors de sa conjecture ; la guerre froide et la décolonisation. Il est le produit de sa société immature et de son temps de conflit Est-Ouest pour la dominance des états postcoloniaux.
Une dictature systémique qui allait s’effondrer 20 ans après pour laisser place dans les années 90 à une démocratie et une libéralisation de façade ! La démocratie est truquée par ses élections indignes. La libéralisation démocratique est uniquement celle de la consommation. La paix civile était financée par les hydrocarbures. Avec la crise des diminutions des pétrodollars, la dette des banques étrangères faisait alors son entrée grâce aux crédits à la consommation des citoyens, mais aussi et surtout des entreprises et même de l’état algérien.
L’état algérien n’a jamais été maitre de notre destin politique ou économique. Il a légué la bonne gouvernance et la bonne gestion aux institutions étrangères ; banques mondiales et FMI dont l’objectif est connu de tous ; privatiser et piller les ressources du pays !
Pour la politique étrangère, on est passé de la rébellion socialiste discursive contre le capitalisme à un silence cosmique: une absence totale de la scène internationale devant les conflits surtout dans le monde arabe. Que fait le président exactement dans sa citadelle et que font ces élus à part lever le bras du « oui » et gesticuler dans une langue arabe décousue des discours de bois digne de la classe d’alphabétisation ?
Que peut faire un gouvernement non représentatif du génie du peuple ? Il n’a pas les compétences pour gérer la complexité et il est infecté de parasites corrompus au niveau des localités. Il est juste attelé aux priorités: ces révoltes continues des jeunes masses assistées qui demandent logements et emplois. On ouvre des milliers de postes de travail bidon, on donne des logements dans un urbanisme sauvage et on double le salaire pour acheter la paix sociale !
Un élu, comme n’importe quel responsable, ne sert pas, en réalité, il ne sert à rien ! Il se sert de l’état et de l’institution comme de son propre royaume. Nous n’avons pas de contrôle de gestion et pire de gestionnaire de projets économiques.
Industrie et développement; de l’Est à l’Ouest
Nous avons raté nos développements successifs en reproduisant les mêmes erreurs du passé. Nous ne faisons que suivre les réformes de l’extérieur sans jamais faire confiance à notre propre génie. La raison est que notre université ne fait pas sortir de génies pour prendre en charge le développement ! Nous avons suivi aveuglément le socialisme de l’Est que nous avons chanté dans les révolutions agraires et nous chantons aujourd’hui un autre refrain ; celui du libéralisme sauvage de l’Ouest sans avoir les moyens de le payer que par la dette.
Les projets de développement, comme celui de l’autoroute ou Desertec, sont 100 % produits par les étrangers avec des figurants folkloriques algériens. Ce sont les Chinois et les Canadiens qui conçoivent et construisent pour nous non pas nos satellites, mais nos routes, nos maisons et nos mosquées ! Vont-ils rester pour les maintenir en marche avec des couts faramineux. Il faut acheter les pièces détachées que nos entreprises devaient fabriquer et concevoir.
Éducation, science et technologie; l’infection plagiaire
Nous avons les dernières universités non pas du monde occidental, mais du monde arabe et même en Afrique ! Nos universités n’ont aucun lien avec l’industrie et le développement. Nous ne produisons presque rien comme publications scientifiques significatives et des patents dans les nouvelles technologies !
Le mal n’est plus dans nos étudiants, mais nos enseignants qui bouclent la boucle de la médiocrité ; le but est de donner des diplômes doctorants bidon à autant de citoyens possibles ! Une réforme universitaire du LMD plagiée sur le système français repris du système anglo-saxon sans aucune considération de la localité. Le plagiat est une infection endémique qui a mis fin au génie local algérien !
Culture; du génie authentique aux starlettes francophiles
Notre culture a connu des pics durant la colonisation ave des génies authentiques comme les Mouloud Mammeri, Mouloud Feraoun, Kateb Yacine … devenus des classiques alors que les nouvelles générations ne peuvent reprendre le flambeau de la créativité. Nous avons maintenant une cohorte de soi-disant plumitifs qui chantent encore la révolution algérienne avec des ballets qui frisent la débilité. On a des séminaires de la culture par une ministre de la culture qui frise l’indécence,
À l’Étranger, nous avons des plumitifs starlettes qui écrivent pour les éditeurs francophiles ; cracher sur l’Algérie, son peuple, sa religion et sa culture au nom de la modernité qui n’est pas la laïcité mais les nanotechnologies dont ils n’ont bien aucun savoir mathématique. La recette francophile est de combattre « l’Obscurantisme islamiste » et vous aurez les prix, les visas et les nationalités. Il faut pisser sur soi pour être moderne!
Dans la colonisation on avait l’esclave qui travaille dans les champs, mais aussi celui qui sert à la maison du maitre ; un peu comme le rat de la campagne et celui de la ville.
Une illustration de cette décadence est dans ces nouvelles starlettes people médiatiques de divertissement populistes francophiles : les Sansal, Daoud, jusqu’à Yasmina Khadra qui avec 36 ans d’analphabétisme dans l’armée est devenu directeur du centre culturel algérien à Paris sans passer par des décennies de recherche académique. Nous sommes loin du génie empathique du maitre d’école de Mouloud Feraoun. Ceci démontre la chute démesurée de l’âme authentique algérienne à cause d’une francophonie coloniale qui veut garder son troupeau dans le bercail à tout prix (littéraire).
Religion ; un débat sur le sexe des anges !
Les Algériens sont pris en tenaille dans le tourbillon d’un débat malsain sur l’islam. Quel islam voulons-nous ? C’est la question qui tue ! Comment voulez-vous une réponse unanime acceptable par tous ? On est rentré dans des débats infinis alors que le débat est sur les nano, bio et infotechnologies.
Le problème des Algériens n’est pas religieux, il est économique et technologique. Nos islamistes sont ici silencieux. Les autres nations baignent dans les sociétés de savoir synergique en réseaux de neurones tandis que nous dormons dans nos mille et une nuits sur le discursif des sexes des anges. Quand allons-nous enfin commencer notre route de développement ? Avons-nous le luxe de perdre plus de temps quand on est déjà à des années lumières des autres nations ?
Dieu le Grand n’a pas peur de mourir et n’a pas à être protégé par des illuminés. Pourquoi doivent-ils le protéger des musulmans ou obliger les musulmans à être PLUS musulmans par la force ? Dieu nous aurait rendus meilleurs s’il voulait. Il disait au prophète ; tu n’es qu’un avertisseur (anta illa nadir). Qui représente Dieu sur terre alors que l’islam justement refuse toute représentation humaine entre Dieu et ses croyants ? Quelles représentativités et droits ont-ils sur nous en ISLAM ?
Il faut combattre les islamistes au nom de l’islam ; C’est à dire au nom de la liberté ! Personne au monde n’a le droit de toucher à notre liberté individuelle de pensée et de conscience ; ma relation privée et intime avec dieu. Seul Dieu sera mon juste ; la ikraha fi addine ! Il faut se battre pour ne pas avoir la religion dans la constitution, mais juste un article ; la LIBERTÉ de pensée, de religion, de conscience et d’expression est garantie à tous les citoyens sans discrimination aucune. C’est la meilleure façon de préserver la religion de toute utilisation de ceux qui se SERVENT d’elle au lieu de la SERVIR !
L’avenir à la lisière du chaos
Que faire avec une démographie galopante, des ressources énergétiques non renouvelables qui vont tarir, et une population mal cultivée, éduquée et formée dans les nouvelles technologies de demain ? Qu’attendre d’un peuple d’assisté qui attend tout de la vache de l’état ; éducation, santé, logement, emploi … gratuit comme un droit divin ?
Quel droit avons-nous sur ce pays quand nous ne lui avons donné ni notre sang et encore moins notre sueur ?
Un principe de thermodynamique dit ; si quelque chose est mauvaise et vous ne faites rien, elle ne peut qu’empirer jusqu’ à la catastrophe. La question qui reste n’est plus s’il y aura un tsunami ou non en Algérie, mais quand ?
Il nous reste encore une dernière lueur d’espoir de nous ressaisir dans ces moments fatals de bifurcation pour prendre la bonne décision avec deux choix ; Extinction ou Mutation, Être ou ne plus Être !
L’espoir est dans ses milliers d’Algériens patriotiques anonymes ; politiciens, éducateurs, médecins, étudiants, responsables, artistes … qui se battent encore et toujours à leur niveau local pour l’avenir de nos enfants à tous. Il faut à tout prix tout faire pour réunir cette masse critique dans une révolution non pas de la rue, mais d’une société de savoir.
L’espoir est dans ceux qui servent des principes, mais ne se servent jamais de ces mêmes principes ; de nouveaux moudjahidines qui donnent leurs sueurs, mais n’exigent jamais une subvention à vie pour ce devoir de citoyen !