Il y a des indicateurs qui dénotent de la régression des valeurs républicaines, en France notamment. Confiné à la mouvance du Front national et de l’extrême-droite en général, le racisme se répand en dehors de sa chasse-gardée, autrefois stigmatisée.
Il devient ordinaire et n’offusque plus. Il prend même des galons et se pare de ce qu’il y a de plus noble. Il faut dire que la cible, aussi, a changé de nature pour correspondre aux attaques. Il ne s’agit plus d’Arabes et de Noirs, mais de musulmans. Une communauté religieuse en décalage de la société dite française, qui lui est hostile.
Le voile des femmes, la polygamie, le mouton de l’Aïd, les prières de rue…Autant d’objets de discorde. Tout a commencé dans les sphères du pouvoir sarkozyste et dans la foulée du basculement dans l’atlantisme. Il a d’abord été question du nettoyage des « quartiers », ces ghettos où s’entassent les français issus de l’immigration non européenne.
Puis fut lancé dans la mare le pavé sur l’identité nationale, menacée par des « pratiques contraires aux valeurs de la République ». Des valeurs qui, selon Nicolas Sarkozy, « sont partie intégrante de (l’)identité nationale (française) » et qui fait, toujours selon lui, que « tout ce qui pourrait apparaître comme un défi lance à cet héritage et à ces valeurs condamnerait a l’échec l’instauration si nécessaire d’un islam de France qui, sans rien renier de ce qui le fonde, aura su trouver en lui-même les voies par lesquelles il s’inclura sans heurt dans notre pacte social et notre pacte civique ».
Des « Français de souche » se manifestent en défense du pays menacé par la barbarie. Parallèlement, dans la vie, au-dessous de ce débat, loin des agoras et des tribunes qui refondent le mode de penser et fabriquent les opinions, les Français « de souche » ou « pas de souche » voient s’effriter des valeurs moins nouménales, celles qui faisaient plus ou moins bon vivre. Le service public est malmené, des coupes sombres sont prodiguées et de horizons noirs sont annoncés. Mais l’attention doit se concentrer sur autre chose, sur ces minorités qui, elles-mêmes, font du repli sur soi un système de défense contre le rejet économique et social.
Le refuge dans la religion gagne de grands nombres, l’ostentation dans l’exercice sert de manifestation de la différence et réponse aux attaques racistes. La communauté des croyants ou la communauté d’origine (le drapeau du pays, son équipe nationale) offrent à l’individu le confort social qui lui est refusé par la société française, pour revendiquer sa citoyenneté non plus comme « intégré » mais en tant que tel avec sa propre identité.
Le contre argument se met en place, insidieux. Il est question d’un « Islam conquérant » qu’il faut juguler ou réduire avant qu’il ne détruise les « libertés » acquises. Ironie du sort, le Front national n’arrive plus à se distinguer du racisme d’Etat qui s’est instauré et qui se profère, y compris, parmi la « gauche », au nom de la laïcité ou de « féminisme » bien pensant (sans les femmes musulmanes, victimes décrétées, et malgré elles, le plus souvent).
A contrario, en phase avec l’atlantisme à l’extérieur, l’initiateur, candidat malheureux aux présidentielles, Sarkozy, change de discours quand il s’adresse aux monarchies pétrolières : « l’islam a porté l’une des plus anciennes et plus prestigieuses civilisations dans le monde… l’islam, c’est le progrès, la science, la finesse, la modernité ».
Même Al Qaïda a pu être « intégrée » dans les opérations de « démocratisation » dans le monde dit arabe, avec la bénédiction du successeur, président de « gauche ».