L’Éducation Supérieure Algérienne ; Quelle Bilan aprés 50 ans ?

ibnrushd

Jamouli Ouzidane

Il faudrait néanmoins être sceptique et critique sur les sources et les méthodes de statistiques utilisées. Enfin, il faudrait reconnaitre les limites des statistiques comme moyennes qui donnent seulement une vue générale et des ordres de grandeur avec des incertitudes.

Bien sûr nous ne possédons pas toutes les statistiques relatives :

– au bilan humain, ; la déperdition humaine est à elle seule une catastrophe. Des centaines de milliers de cadres ont fuit l’université algérienne vers l’occident attracteur alors que cette éducation a couté des milliards à notre pays . Ils sont soit au chômage par manque de reconnaissance de diplôme ou dans les brillantes universités californiennes à faire le bonheur de l’Amérique ! Il serait très intéressant de contacter les démissionnaires juste pour connaitre les raisons. Sont-elles personnelles,  job-satisfaction, paye, ou logement. La question est ; Peuvent-ils aider de l’extérieur et quelles sont les conditions de leur retour ?

– au bilan production technique ; ce bilan fera apparaitre les chercheurs qui depuis des années n’ont rien produit. Il faudrait rappeler ici que le monde de la recherché en Algérie a été infesté de médiocrité. Il est donc nécessaire que chacun puisse reprendre son véritable statut. L’évaluation pour être objective doit être tierce (par des universitaires autonomes pour chaque spécialité) et non interne. On doit faire revenir le mérite à la production (scientifique et patent) et non plus aux seuls diplômes !

– au bilan financier ; On est certain que si les règles de gestion économique sont appliquées, les universités devraient fermer leurs portes depuis longtemps. Nous pensons que dans le futur, il sera indispensable de les appliquer. Les universités doivent absolument faire rentrer de l’argent ; créateur de richesse et non plus créateur de diplômes uniquement !

Ce bilan fera donc apparaitre l’aspect humain (recrutement, formation, transfert de technologie, réalisation, et enfin le degré de « brain-drain » interne et externe), et l’aspect matériel (investissements,  prestations de services, relations financières avec l’industrie et l’université).

Ce bilan devra permettre aux décideurs de connaitre objectivement la situation et d’entreprendre des actions de redressement. Il existe actuellement un gouffre financier qui risque de les conduire à la faillite. Les subventions ne peuvent rester indéfiniment. La restructuration, la formation, la compétitivité, les prestations de services,  et  les  relations avec l’industrie sont des exigences de l’heure.

– notre but n’est pas de faire un bilan exhaustif et ennuyeux sur les problèmes des CR pour comprendre la situation actuelle de crise. Il s’agit surtout de dégager les points forts. Le besoin de faire un bilan (un audit) spécifique à chaque unité de recherche est nécessaire à tous les gestionnaires qui ont à gérer les structures des recherche.

Des problèmes surgiront dans ce bilan ;

– le manque de statistiques ;  manque de sources d’information, de représentants des relations extérieurs, etc.

— le problème du « secret » et de la « confidentielle » est utilisé comme chantage par les gestionnaires pour cacher leurs incompétences de gestion.

 

Bilan

Une chose que tout le monde de la Recherche algérienne s’accorde à admettre est :

– l’échec lamentable de la RS en Algérie vu son effet nul sur sa participation à la prospérité (matérielle et intellectuelle) de la société algérienne et de sa propre subsistance d’assistée !

– les sommes astronomiques qui ont été dépensées dans le secteur de la recherche scientifique (dont malheureusement l’universitaire n’a pas bénéficié). Des sommes aussi et surtout dans les logements sociaux et ensuite dans la paye qui est maintenant la plus élevée du secteur publique comparativement au secteur de la santé et aux médecins par exemple !

– la mauvaise gestion de ressources humaines et matérielles considérables.

La démocratisation massive de l’éducation en Algérie, le manque de pédagogie, la coopération avec les pays de l’Est, les différentes chartes démagogiques de l’université, et enfin les combats idéologiques ont fini par ruiner le système éducatif. Les universités deviennent des usines de diplômes.

Ceci s’est traduit par :

– la valeur de la formation reçue est médiocre, mal assimilée, vague et approximative.

– Sclérose des programmes (normalement ils doivent changer tous les trois ans (eg. introduction des cours de « Méthode des  intégrales de frontières » « Intelligence artificielle », « Systèmes experts », « cybernétique », « Robotique »… en Engineering)

– indulgence aux examens et plagiats généralisés !

– mauvaise orientation, évaluation et sélection

– nombres de professeurs réduits et souvent incompétents

– manque de  culture scientifique générale (exposés, recherches, contacts extérieurs internationaux)

Le problème du « pouvoir » a pris des proportions inquiétantes dans la RS en Algérie. Au début des années soixante, les cadres étaient simplement des affiliés politiques ; Ils appartenaient aux affiliations claniques de l’état. Les dégâts étaient considérables, mais camouflés par les rentes pétrolières.

Dans les années soixante-dix des cadres intermédiaires ont vu le jour. Ils s’agit d’étudiants en dernière année universitaire qui sont devenus enseignants après obtention de leurs diplômes d’ingénieur, de  DES  ou  de licence et finalement devenus des Docteurs et Professeurs.

Ces « cadres » ont pris les positions de pouvoir vacant au niveau des universités. Ils ont aussi acquis les diplômes de « docteur » dû à l’anarchie qui régnait en ces temps là. Il suffisait alors de connaitre trois autres « docteurs  » pour  constituer  un  jury  et  choisir  un  sujet quelconque. Une fois installés, ces messieurs légifèrent de  nouveaux  textes et font ainsi barrière aux suivants.

La  médiocrité  de  l’enseignement  s’est  ainsi  installée pour bien longtemps. Ces nouveaux cadres ont continué à faire des dégâts aux  futurs PHd des universités prestigieuses Américaines,  Anglaise,  Allemandes  et Françaises. Ces chercheurs qui ont des références solides se retrouvent dans un environnement hostile, brisés, harcelés et humiliés quotidiennement. Certains ont été carrément renvoyés pour « incompétence »! Certains continuent de combattre le système de l’intérieur, d’autres intègrent les « rangs », mais la majorité a fui le système par l’exil forcé !

La  minorité  de « doctours » qui ont joint, le système continue, le massacre à la différence des anciens c’est qu’ils sont des  légitimes de la science puisqu’ils possèdent des doctorats. D’autres conflits apparaissent avec les problèmes d’équivalence des diplômes français, anglo-saxons, et des pays de l’Est et finalement une greffe de l’extérieur comme toujours ; la réforme de LMD catastrophique.

Les autres cadres qui se sont versés dans l’industrie ont finalement fait leur lit de mort avec des postes de ‘chef’ de structure. Les industries « clé en main » avaient une vocation exclusive de ‘production’.

Seule la maintenance pouvait intéresser les décideurs. Les techniciens ne possédaient aucune liberté de « créativité ». La majorité a été détournée de leurs formations originales. Ainsi, le technicien en sécurité industrielle devient responsable de l’hygiène et du gardiennage.

Après une dizaine d’années d’hibernation, les cadres techniques se sont abrutis et ne peuvent plus comprendre les techniques modernes. Certains se sont adaptés avec beaucoup de courage, mais la majorité continue à s’accrocher à des postes administratives et politiques avec un machiavélisme des  plus primaires.

La dernière débâcle fut le marché libre’ qui assommera définitivement les industries algériennes qui étaient basées sur la production. L’import Export peut acheter des produits moins chers que le produit local sans absolument aucune protection de l’entreprise locale.

L’erreur dans cette histoire est la confusion entre scientifique et gestionnaire. Un scientifique s’il veut gérer doit passer au moins deux années dans des grandes écoles de gestion pour apprendre l’économie, la sociologie, le management, la recherche opérationnelle, etc.  Tous les transferts de technologie en Algérie étaient « techniques »  ie  conception, production, exploitation, maintenance,  etc.,  mais jamais on n’a fait de transfert technologique sur les méthodes de gestion en envoyant en stage le financier, le personnel, le juridique, les moyens généraux, et même le directeur.

 

Perspectives ?

Une fois le bilan bien établi, il faut alors donner des  solutions à ces problèmes, car « la critique et facile, l’art est difficile » et rien se sert à maudire l’obscurité, le mal est là !

Ces solutions ne sont pas des recettes miracles, quelquefois elles sont connues de  tous,  et  il  y’ a une volonté délibérée de sabotage, car la médiocrité et le machiavélisme sont solidement installés.

Il faudrait aussi comprendre que la crise de l’éducation est une crise ‘normale’. Cette crise n’épargne aucun pays durant son itinéraire de développement. Elle prend toutefois une forme dramatique pour les pays sous-développés. L’historique des  pays industrialisés a montré que ses entreprises on commencé à une échelle « humaine » qui pouvait maitriser et donc résoudre les problèmes ‘locaux’.

L’expansion s’est fait naturellement jusqu’à la maitrise par le management des  problèmes de gestion des grandes entreprises (passage de la petite et moyenne entreprise à la grande société internationale). Ceci montre la difficulté pour nos entreprises qui sont nées par  un effet de ‘Big -Bang’ (révolutions industrielles) et qui doivent faire face à une organisation hautement singulière et dont la complexité croît à un rythme accéléré.

Le stratège (responsable) est obligé à se battre pour tout recréer et réinventer ;  un nouveau personnel de qualité, des nouvelles techniques de communication, une nouvelle mentalité d’entreprise, une nouvelle approche cognitive avec les technologies NTIC de e-learning …

Comme nos universités sont déjà infectées, la solution ne peut exister que dans des universités privées libres d’une législation désuète et d’une bureaucratie déconnectée de la mondialisation ; de ce qui se passe en dehors de l’enceinte universitaire !

Jamouli Ouzidane

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